Notes de mise en scène

Spectacle de théâtre visuel, « TERRE D'EXIL » joue sur une alternance de passages au jeu d'acteur très physique et enlevé avec des séquences sensibles et émouvantes. La construction du spectacle tourne autour de trois pôles : le récit comme fil conducteur, le temps de l'errance, l'évocation du drame qui se passe dans leur pays au travers de scènes de « théâtre de rue ».

LE RECIT : L'homme se souvient de tout ce qu'ils ont vécu à deux, sa femme et lui, comédiens chassés de leur pays par la guerre et la censure. Les paroles s'adressent aux spectateurs comme à un confident à qui l'homme veut raconter l'histoire de leur fuite sur la route. Ces courtes ponctuations de récit introduisent en quelques mots les scènes de jeu, re-situant les lieux et la chronologie des évènements. Ils sont là pour créer l'évidence et permettre à la mise en scène la liberté d'un traitement original. Dans ces instants de narration, le comédien est juste éclairé par un halot de lumière en bord de scène.

LE TEMPS DE L'ERRANCE : Les deux acteurs sont dans le jeu théâtral, dans l'interprétation de leurs deux personnages sur la route. C'est le temps de l'action sur tout l'espace scénique. Glissement d'éclairage qui englobe la totalité de l'aire de jeu. Utilisation de bruitages du quotidien comme un décor sonore.
A partir du thème sensible et douloureux de l'exil, l'idée est de faire ressortir la force de vie et le fol espoir des deux personnages, comédiens chassés loin de chez eux, qui veulent par leur théâtre et les marionnettes qu'ils ont emportées dans leurs valises, raconter la misère, la dictature, la guerre et l'oppression qui assassine leur peuple. Ils sont sur le chemin vers l'inconnu ; les actions évoquent leur errance, leur angoisse, leur solitude. Avec leur théâtre ambulant, ils forcent les rencontres, ils obligent leur vie déchiquetée à rencontrer encore le jeu et le rire. C'est l'image de la fête et de l'amitié qui les sauve de leur passé et leur donne la force d'avancer.
Dans la construction du spectacle, il y a des scènes très enlevées, drôles, vivantes, insouciantes qui illustrent leur désir de vivre heureux envers et contre tout : jeu de courses-poursuites, danse frénétique, éclats de rire, chants, chamailleries amicales... Il leur faut saisir chaque petit instant de bonheur pour pouvoir continuer leur chemin. C'est leur énergie de raconter, de faire vivre au travers de leurs marionnettes les souvenirs de ceux qu'ils ont laissés là-bas qui leur donne la force de continuer, marche forcée qu'ils s'évertuent à rendre légère.

L'EVOCATION DU PASSE : THEATRE DANS LE THEATRE : Les séquences de jeu physique et gestuel qui caractérisent le temps du voyage mettent en évidence, par contraste, des passages plus intimes, les moments où ils deviennent comédiens -marionnettistes, dressant leur rideau de théâtre dans un coin de rue pour raconter aux passants l'histoire du pays natal. L'éclairage se resserre sur les valises et les ballots qu'ils transportent avec eux. De leurs bagages, ils font naître des silhouettes de personnages, marionnettes grandeur nature, têtes expressives, burinées, marquées par la vie, yeux immenses, corps de tissus raccommodés, marionnettes manipulées à vue par les deux acteurs. Ce sont les enfants de leur village, les voisins, la grand-mère d'à côté, la grosse dame de la boulangerie, les membres de la milice qu'ils ont dû fuir. Les corps de ces personnages de latex et de chiffons se déploient hors des valises et prennent vie au centre de la scène. C'est la place du théâtre, ce théâtre de la vie, celui qui raconte des histoires vraies, vécues par des gens vrais avec des destins improbables, ballottés par les circonstances inattendues de la guerre, de la fuite, de l'exil.
Les souvenirs que ces deux comédiens transportent avec eux, ces pans de leur histoire personnelle enfouie au fond de leurs bagages, tout cela fait partie intégrante de ce qu'ils sont eux, comme homme et femme. Sur le chemin, de places en places, partout où ils montent leur castelet dérisoire, c'est une nouvelle vie de théâtre qui ne peut ni oublier ni gommer la vie passée, belle et joyeuse parfois, triste et cruelle souvent, histoire ancrée au plus profond de leur être et dont ils ne pourront jamais se séparer.
Vivre avec, tout en faisant confiance à la vie à venir... dans leur nouvelle terre d'exil.

 

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