Il y en a un qui s'est fait sienne la devise « Les petits ruisseaux font les grandes rivières » : c'est le plombier.
Sauf que lui, plus finaud que tout le monde, il part de la goutte d'eau. Une petite fuite, c'est son bonheur à lui. Et c'est l'angoisse et le désespoir de tous les autres.
C'est « Histoire d'eau », l'érotisme en moins, les dégâts en plus.
La goutte d'eau qui déborde du vase d'expansion, c'est tout bénef pour le gars qui s'y connaît en tuyau. Vous, simple quidam sans grande compétence, vous aurez beau chercher à resserrer les écrous, enturbanner les filetages de téflon, de filasse, de pâte d'étanchéité et tout le tintouin vendu dans tout bon magasin de « brico déballage », la petite goutte d'eau qui goutte, goutte, goutte, vous n'y viendrez pas à bout.
Vous passerez par toutes les étapes, entre espoir et accablement. Vous naviguerez du grand bonheur (en ayant l'illusion d'avoir réduit à presque rien l'écoulement) au désespoir complet (quand, d'un dernier coup de serrage quasiment vainqueur, vous provoquez un écoulement bien pire que celui du début). Puis, après avoir lutté désespérément contre la perspective d'infiltrations sournoises derrière les placards, sous la moquette, entre les lames du plancher, sur le matériel informatique du voisin d'en dessous, vous décidez enfin de tout couper : un quart de tour pour la vanne générale.
A cet instant, deux cas de figure s'offrent à vous :
- Premier cas : vous êtes intrépide, acharné, buté, inconscient ou les quatre à la fois : vous retournez au magasin de « brico emtubage » pour acheter un nouveau kit de clefs de serrage, une nouvelle pâte miracle, un nouveau joint de la bonne taille et vous passez une deuxième demi-journée à serrer, desserrer, colmater, vider des bassines, tantôt en jurant des « Nom de ... », tantôt en hurlant à tue-tête, avec toutes les notes et l'orchestration adéquate « L'aventouuuuraaaa , c'est la vie que je mène avec toouuuaaa ...... » Au final, harassé et le moral dans les chaussettes mouillées, vous vous décidez enfin à appeler un vrai plombier.
- Deuxième cas : vous êtes un peu moins intrépide et surtout beaucoup plus découragé : vous appelez illico presto un vrai plombier.
Remarquez que dans les deux cas, on arrive au même résultat : le plombier.
Un tuyau : n'appelez pas « Ets Jean Tube, Plombier Chauffagiste » ou « SARL Kicoulpu » ; les deux vous proposeront un rendez-vous dans trois mois pour rédiger un premier devis. Appelez « SOS Plomberie 24 / 365 » ou « Dépanne Minute, Jean Jacques Saitoufaire ». Comme les autres plombiers, ils partagent la devise des « petits ruisseaux », mais interviennent dans les deux trois heures au mieux, dans les quatre cinq jours au pire. Il ne faut pas trop se plaindre.
En attendant, continuez à éponger, tout en commençant à réunir toutes vos économies. Une petite goutte d'eau incontrôlée et voilà les projets de vacances qui s'éloignent, la rénovation de la chambre du petit remise à plus tard, les sorties restau et cinéma abandonnées pour l'année qui vient. Je vous l'ai dit : les petits ruisseaux font les grandes rivières ! Goutte après goutte, et coute que coute.
Pour ce qui est de la combine de « SOS Plomberie 24/365 » et de « Jean Jacques Saitoufaire », gardez le tuyau pour vous. Si tout le monde le sait, c'est qu'il y a eu une fuite. Et les fuites, c'est toujours le bonheur des plombiers. Décidément, on n'en sort pas !